Antiquité
Les premières traces d’existence humaine
dans le pays de Grasse datent du néolithique. Des
archéologues grassois du XIXe siècle tels que Paul Goby,
Marcellin Chiris, Adrien Ghébart ou Casimir Bottin ont
décrit et étudié les vestiges d’une
activité humaine remarquable : dolmens,
dolmens à couloir, tombes à chambre carrée,
tumuli, « bories »,…
mettent en évidence l’existence d’une population plus importante
qu’ailleurs. Plus étrange, ils y découvrent de grosses
enceintes faites
d’énormes blocs dont l’utilité reste mystérieuse
et qu’ils appellent
« Castellaras ».
Durant l'Antiquité, la Provence a vu de
nombreuses civilisations la parcourir et parfois s’y installer comme
les Ligures, les Phéniciens, les Carthaginois ou encore les
Grecs. Mais ceux qui se sont le plus fixés à Grasse sont
sans doute les Romains.
Outre les nombreux vestiges présents dans le Pays de Grasse, on
peut en
effet affirmer qu’un poste romain y a existé. De plus, à
la place de
l’actuelle chapelle de Saint-Sauveur ou de Saint-Hilaire se tenait un
temple dédié à Jupiter.
Les envahisseurs barbares n’eurent pas de
difficulté à envahir la Provence orientale qui tomba aux
mains successivement du patrice Stilicon (416), des Burgondes (443),
des Ostrogoths (493), des Francs (534), puis des Lombards (817).
Moyen Âge
En 875, la Provence se rattache au Royaume de
France et Boson, nouveau roi, lui fait signer acte d’allégeance
le 15 octobre 879. Grasse refuse de le signer et se détache donc
de la Provence. Elle se rattache alors au Royaume de Lombardie sous le
règne de Charles II le Gras en 879, puis au Royaume de Bourgogne
Jurane sous Rodolphe II, au Royaume d’Arles sous Rodolphe III.
Dévastées par les Arabes, Grasse et sa région sont
reconquises par les princes d’Arles
qui donnent la Ville au Chevalier Rodoard qui avait aidé
à cette
libération. Rodoard est le fondateur de la maison de Grasse. Les
Seigneurs de Grasse mirent en place un régime féodal qui
fut contesté
par les grassois et qu’ils rejetèrent avec l’aide de Monseigneur
Mainfroy de Garibaldi. Ainsi, dès 1138, le comte Raymond de
Grasse n’a plus d’autorité sur la ville, mais seulement sur ses
possessions antiboises.
Nouvellement libre, alors que partout ailleurs,
se tiennent encore
des régimes féodaux, le peuple grassois abolit le
servage. Une
aristocratie se forme et prend le pouvoir, sous forme de consuls
élus
pour un an au nombre de quatre. Ils représentaient la ville
auprès des
autres républiques, des seigneurs, des villes voisines, de
l’évêque,
ils possèdent le pouvoir judiciaire, bien qu’assistés par
des « judex
consulum », ils organisent la défense de la ville,
fixent les impôts et
nomment les fonctionnaires de la ville.
En 1171, le Consulat signe un traité
politique et commercial avec Gênes d’une durée de 29 ans
et qui fut le premier d’une longue série qui dura près de
trois siècles. En 1179, c’est avec Pise que Grasse signe un
traité pour 26 ans. La ville aime commercer avec des villes
indépendantes comme Gênes
en exportant ou important toiles, cuirs, blé, peaux brutes,
peaux
tannées, vin et bétail. Sa nouvelle liberté fait
fleurir le commerce
avec les villes voisines qui cherchaient a conclure des alliances avec
les Consuls. Ainsi, en 1207, les Comtes de Castellane offrirent
à Grasse un droit de passage et de pâturage sur leurs
terres. En 1212, c’est au tour du Seigneur de Séranon de
conclure les mêmes accords.
Les évêques d’Antibes s’installent
à Grasse et le Pape Innocent IV transporte officiellement le
siège épiscopal d’Antibes à Grasse le 19 juillet
1244.
Mais cette importance grandissante attire l’attention du Comte de
Provence Raimond Bérenger qui attaque la ville. Et malgré
une défense
héroïque menée par le Chevalier Hugues Sicard de
Tourettes, Grasse est
vaincue en 1220 et rattachée au Comté de Provence.
Le Comte de Provence prend possession des deux
tours du Puy et de la Foux le 24 juillet 1227.
Il maintint les consuls, mais nomme un juge et un bayle et instaure de
nouveaux impôts : l’albergue, le droit de ban, les
chevauchées (ou
cavalcades), l’aide aux quatre cas et la gabelle du sel.
Sicard, le bayle nommé à Grasse
pour rendre la justice au nom du
Comte fit de Grasse un chef-lieu de baylie. En 1250, Grasse devint
également chef-lieu de Viguerie. Le viguier rendait, lui, la
justice au
nom du Roi, mais possédait aussi un rôle administratif
immense et le
Conseil municipal mit du temps à imposer son autorité
face à un tel
personnage, premier fonctionnaire de la Ville. Hiérarchiquement,
sous
le viguier, une organisation administrative importante se met en place
avec des sous-viguiers ou lieutenants de viguerie, des juges, des
clavaires, des regardeurs… La Viguerie de Grasse comprend alors
Briançonnet, La Motte, Saint-Vallier, Auribeau, Le Rouret, La
Garde, Mouans, Escragnolles, Avignonnet, Saint-Cézaire, Le Bar,
Gourdon, La Roquette, Mougins, Biot, Cannes, Roquefort,
Châteauneuf, Opio, Caussols, Clermont (au XIXe siècle, en 1822, par
décision royale, la commune du Clermont est rattachée
à Châteauneuf) , Sartoux, Cabris, Saint-Panduce,
Cipières, Canneaux, Touron, Pégomas, Magagnosc, Antibes,
Auria, Olive, Garbies, Valettes, Calian, La Malle, Thorenc, Andon,
Arlucques et Revert. Au travers de cette viguerie, on voit
déjà se dessiner le Pays de Grasse.
Carte de Cassini de la Région de
Grasse. On y
discerne en grosses lettres l'inscription "Viguerie de Grasse"
Grasse obtient des privilèges du Comte de
Provence,
puis des Rois et Reines de France : liberté de commerce,
liberté de
l’héritage, droit d’affouage et de pâturage dans les lieux
voisins,
baisses et exemptions d’impôts, liberté de culture et
d’élevage, droit
de posséder une cloche, indulgences judiciaire, charité
aux pauvres de
Grasse. La famille royale fut ainsi reconnaissance de la
fidélité de
Grasse à sa cause jusqu’à Louis XIV qui respecta moins
ces franchises. L’artisanat de la tannerie est la principale
activité économique et commerciale.
Le XIVe siècle
est celui des religieux qui construisent de nouveaux couvents et
agrandissent les remparts pour les protéger. Derrière ces
nouvelles
fortifications, on crée de nouvelles maisons, autour de la Place
aux
Aires. La population s’accroît. En 1321, Grasse compte 6000
habitants.
Le XVe siècle
est le théâtre de nombreux malheurs. Pour protéger
la Provence des troupes meurtrières du Roi Alphonse d’Anjou, les
Grassois se battent et s’affaiblissent. Puis, ce sont deux
épidémies de peste en 1451 et 1470 qui tuent le tiers de
la population. En 1482, Louis XI agrandit son Royaume et annexe la
Provence. Grasse devient française.
Renaissance

Monument en
l'honneur de l'Amiral de Grasse, Place
du Cours à Grasse
Pendant la Renaissance, Grasse doit encore subir
l’invasion de Charles Quint, au cours de laquelle la ville est
incendiée et pillée. En 1589, Grasse prend position en
faveur d’Henri IV et de son Édit de Nantes dans les guerres de
religion,
ce qui lui attire les foudres du Baron de Vins qui fait le siège
de la
ville pendant huit jours. Grasse se rend, mais le baron est tué.
Durant le XVIIe siècle, Grasse se relève.
C’est l’apogée de l’industrie de la tannerie, mais aussi le
début de celle du parfum et des « gants
parfumés »
Grasse est connue au siècle des
Lumières pour l’intervention cruciale des troupes navales de
l’Amiral de Grasse, issu de la lignée des Comtes de Grasse, dans
la victoire des États-Unis d'Amérique contre les colons
britanniques. C’est à bord de « La Ville de
Paris » qu’il remporte la victoire de Chesapeake.
Jean Honoré Fragonard, enfant de Grasse
devient « Peintre du Roy » sous la pression de la
Marquise de Pompadour.
Des hôtels particuliers sont construits
pour la noblesse provençale
(les Clapiers-Cabris, les Court de Fontmichel…) qui aiment
séjourner à
Grasse. La Place aux Aires s’embellit avec la construction d’une
fontaine.
Le 15 juin 1789 Honoré-Camille de
Mougins-Roquefort, alors curé de Grasse, fait partie des
premiers curés élus du clergé qui refusent de
siéger dans la salle des Cent-Suisses et rejoignent le
tiers-état. Lors de la division de la France en 83
départements par l'assemblée Constituante, en janvier
1790, Grasse fait partie du département du Var dont elle sera
chef-lieu de 1793 à 1795.
1792, c'est la Révolution. À la
proclamation de la République,
l’extrême gauche s’empare de la mairie. Grasse est alors une
ville de
tradition opportuniste et commerçante, globalement
opposée à la Révolution. Bien que l'on puisse
croiser sur des maisons l’inscription suivante : « Ici
on s’honore du titre de citoyen. Les hommes sont égaux devant la
Loi. Respect à la Loi et ses Ministres. », une
guillotine
est installée où sont exécutés trente
« ennemis du peuple » et de
nombreux Grassois sont emprisonnés pour avoir montré leur
hostilité à
la Révolution.
La ville de
Grasse
Époque moderne
Le XIXe siècle est en revanche un
siècle de prospérité. Le parfum
se développe et Grasse devient « Capitale mondiale
des Parfums ». Elle
s’ouvre vers l’extérieur et de grandes usines apparaissent,
signe
d’adhésion à la Révolution industrielle. C’est
également le début du tourisme : on apprécie
la qualité de vie, les paysages et le climat qui y règne.
La Princesse Pauline y séjourne en 1811
et donne son nom au jardin où elle aime se reposer. De riches
étrangers
construisent de magnifiques villas et la ville s’enrichit en
curiosités
diverses. À la création des départements en 1790,
Grasse appartenait au Var, dont elle fut même le chef-lieu de
1793 à 1795. Son arrondissement en fut détaché en
1860 pour former, avec le comté de Nice qui venait d'être
rattaché à la France, les Alpes-Maritimes.
Au XXe siècle,
Grasse garde sa réputation touristique et l’industrie des
parfums se transforme et se modernise.
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